Parution dans Politis le 19/04/2012 <°°°>
A
Mme le maire du XX ème arrondissement Frédéric Calandra,
aux élus,
Mme Fabienne Giboudaux adjointe au maire de Paris,
habitante du quartier Belleville,
Mme Hoffman-Rispail députée
de la 6ème circonscription,
aux futures candidates aux élections
législatives
Mme Danielle Simonet pour le front de gauche
et
Mme Cécile Duflot pour les verts-ps ;
en ce presque jour
d'élection et du choix qu'il nous sera donné pour présider le
pays, chacun d'entre nous voit néanmoins midi à sa porte.
Aussi
nous vous demandons de prendre position sur : quelle
politique culturelle menée à Paris au regard de ce qui se passe
aujourd'hui rue Ramponneau à la Forge de Belleville.
L'association
TRACES a œuvré au côtés de la Ville pour que l'argent public ne
soit plus détourné au profit d'intérêts particuliers mais serve à
l'intérêt général. TRACES a rendu la forge de Belleville à ses
habitants et aux parisiens. Elle en a fait un lieu artistique et
culturel ouvert à tous, mêlant l'excellence à l'amateurisme au
profit de la création. Emmener les gosses voir Basquiat avec leur
famille, revenir à l'usine, se mêler aux artistes résidents,
peindre, bricoler, exposer. Venir le samedi matin pour une
mobilisation des parents d'élèves, revenir le soir et retrouver les
copains qui traversent la rue un paquet de chips à la main pour une
soirée performance, un concert, rigoler, ne pas tout comprendre, se
moquer des adultes qui disent chut. Etre là, vivant, au milieu du
monde, participant.
Et
pourtant ce projet s'est souvent heurté à la technocratie des
fonctionnaires, la lâcheté des politiques, se nourrissant de
polémiques stériles, mais nous l'avons tenu malgré les coups durs
et nos manques.
Aussi
parce que nous habitons dans les mêmes immeubles que ces gens, parce
que nos enfants vont à l'école ensemble et parce que nous sommes
tout autre chose, artistes, enseignants, écrivains, cultureux, nous
créons du lien entre l'ici et l'ailleurs, entre eux et nous parce
que nous sommes eux et qu'ils sont nous, c'est notre force.
TRACES
n'a pas remporté le nouveau marché public lancé sur laForge de
Belleville, la Ville préférant un prestataire plus « avantageux
économiquement », jugeant « nos partenariats peu
convaincants en termes de contenus », qualifiant « nos
moyens humains, certes, importants mais de qualité incertaine ».
Pensez
vous que la culture et l'art doivent être économiquement
avantageux, qu'ils doivent être confiés à des experts,
techniquement opérationnels, trustant l'argent public au profit
d'une classe sociale identifiable, dite « bobos » ?
Quelle
place laissez-vous aux initiatives associatives, citoyennes,
militantes, engagées, participatives ?
Quelle
place donnez-vous à l'expression, la création ?
Condamnerez-vous
TRACES à une arrière salle de centre social et les artistes à des
cages de verre soumis au regard des marchands du temple ?
Gentès
Déborah, enseignante, administratrice de TRACES
|
réponse de
Mme Cécile Duflot pour les verts-ps et
Mme Fabienne Giboudaux adjointe au maire de Paris,
habitante du quartier Belleville <°°°>
en Pdf <°>
|
|
Paris,
le 16 avril 2012
A l’attention de :
Monsieur
le Maire de Paris, monsieur son adjoint à la culture
mesdames
et messieurs de la DAC
Madame
le maire du 20ème,
monsieur son adjoint à la culture.
Je
vous fais part de ma colère face à la décision qui vient d’être
prise de ne pas attribuer le marché public de La Forge de Belleville
à l’association T.R.A.C.E.S dont je suis administratrice depuis de
nombreuses années.
C’est
d’une colère citoyenne qu’il s’agit, d’une colère nourrie,
non par le fait d’avoir perdu à cette mise en concurrence, sur
laquelle il y aurait là aussi beaucoup de choses à dire en termes
de gestion d’une politique culturelle de gauche, mais par les
termes mêmes de la notification qui sont d’un mépris et d’une
violence institutionnelle à la hauteur d’une politique de droite
et qui bafouent les valeurs essentielles qui définissent celles de
gauche. Celles dans laquelle j’ai été élevée, celles pour
lesquelles je me bats, je milite, je travaille au quotidien avec les
enfants des plus démunis.
Sur
l’un des critères, notre offre a été classée deuxième « malgré
tout l’intérêt porté à un projet culturel centré sur la
méthode Freinet et des partenariats présentés qui demeurent
néanmoins assez peu convaincants en termes de contenus».
Déjà,
en employant ce mot « méthode »,
vous montrez
bien que vous n’y connaissez rien et que les liens entre une
pratique pédagogique et une pratique démocratique d’accès à la
culture vous échappent totalement car c’est bien d’une pratique
qu’il s’agit et non pas d’une méthode, ce qui est totalement
différent. A moins que cela vous fasse peur ? De quel droit
jugez-vous que le travail de Célestin Freinet et de tous ceux qui le
font vivre depuis bientôt un siècle, n’est pas convaincant en
termes de contenus ? Lui qui au-delà de ses pratiques
pédagogiques était un véritable homme de gauche, un résistant, un
homme pour qui l’acte créateur est le fondement de
l’apprentissage, du travail et de la vie en société de tous les
hommes et les femmes sans aucune distinction sociale. Avant de juger
veuillez lire ses textes, veuillez regarder pourquoi ces pratiques
pédagogiques sont toujours vivantes, en quoi elles participent
toujours et encore à la résistance politique face aux attaques
libérales qui détruisent nos écoles. Le pire c’est que vous êtes
d’ailleurs forts capables et vous le montrez régulièrement de
mettre en avant ce type de pédagogie dès lors qu’il s’agit de
flatter un électorat….mais méfiez-vous cet électorat en question
n’est pas dupe et il ne faudrait pas jouer trop longtemps à ce
petit jeu, même s’il souhaite comme vous que la gauche revienne au
pouvoir dans les prochains jours.
Mais
au fait, j’y pense soudainement, cela poserait-il un problème que
personne de l’association ne soit encarté au PS ? Mais non,
bien sûr, la question n’est pas là ! Je me demande vraiment
pourquoi cette idée saugrenue me vient. Un procès d’intention me
répondrez-vous.
Nos
partenariats ne seraient pas convaincants en termes de contenu ?
Pour sûr, ils font tous appel à des valeurs qui prennent bien soin
effectivement de ne surtout pas mettre en avant une culture
« avantageuse
économiquement ».
C’est donc aussi la culture populaire que vous bafouez, celle de
Jean Vilar et autres créateurs de l’époque, encore grandement
représentés aujourd’hui dans le vivier artistique français,
celle pour qui le peuple a plus d’importance que l’élite.
Dois-je
aussi vous rappeler que l’accès à la culture est un droit
inaliénable décliné dans la Déclaration des Droits de l’Homme
et dans la Convention Internationale des Droits de l’Enfant ?
Notre
équipe relève à vos yeux « de moyens importants mais de
qualité incertaine ».
Là, je me sens carrément insultée par de tels propos. Insultée en
tant que personne mais également en tant qu’habitante d’un
quartier parisien au cœur de la diversité. Je me sens insultée
pour tous ceux qui nous font confiance en ouvrant la porte de la
Forge, pour voir, s’imprégner, échanger, y laisser travailler
leurs enfants à l’atelier ou y participer avec ou sans eux
d’ailleurs. Insultée pour les artistes qui y travaillent.
Monsieur
Delanoé, je me revois encore lors de votre compte-rendu de mandat en
novembre 2010, prendre la parole, être entendue et recueillir alors
de vous des engagements publics pour que les activités de
T.R.A.C.E.S, sur le site puissent enfin se pérenniser. C’est
devant le peuple ce jour là que vous avez interpellé vos adjoints
pour qu’ils fassent le nécessaire!
Jamais
je n’aurais pu penser que ce nécessaire était de nous prendre
lâchement pour des serpillières et de nous jeter une fois que nous
aurions bien tout nettoyé !
J’ai
honte que ceux que j’ai élus, et avec qui l’association a
travaillé en totale confiance depuis 3 ans, pour que des artistes
bannis par vous-mêmes laissent la place à notre projet que vous
trouviez alors formidable, balayent d’un trait un projet dont vous
disiez alors vous-même qu’il était ambitieux.
Sachez
mesdames et messieurs que je, nous, n’en resterons certainement pas
là, que nous entendons porter publiquement notre colère, que nous
sommes
prêts à lutter pour
sauver un lieu ouvert à ceux dont personne ne veut jamais, vous
savez, les pauvres, ceux qui sont franchement pénibles parce qu'ils
ont toujours des problèmes, qu’ils ne savent même pas
causer la France, dont on les expulse d’ailleurs à tir
ouvert, ceux qui n'ont que des sales et trop nombreux
gosses qui ne sont mêmes pas capables d'avoir de bons résultats aux
évaluations nationales, qui de ce fait dévalorisent totalement
l'image de la France et qui en plus dès qu'ils grandissent un peu
deviennent de vrais délinquants, surtout lorsqu’on les empêche de
penser et qu’on les trompe!
Finalement,
c’est vous qui devriez avoir honte, de nous, de les, avoir trahis
et de renvoyer un quartier à l’abandon d’un projet qu’il
s’était vraiment approprié.
Françoise
Salmon
Administratice
de TRACES
Habitante
du 20ème
arrondissement
Enseignante,
chargée de direction d’une école parisienne, ayant obtenu le
statut d’école expérimentale au regard des valeurs de la
Pédagogie Freinet et de leurs mises en pratiques et fière de
l’être !
|
relire la notification <°>
de la DAC
motion ICEM
<°°°>
voir plus bas
|
|
|
T.R.A.C.E.S (Trait Reflet Action Contraste Espaces Singuliers)
est un lieu de vie et d'expression : ateliers « enfant-parent »,
ateliers d'artistes, liens avec les écoles, organisation de
manifestations artistiques sur le quartier et liens très forts avec ses
habitants, forte implication dans les réseaux sociaux. Elle porte les
valeurs de l'éducation populaire.
L'association est implantée à Belleville (Paris) dans une ancienne usine
transformée en ateliers d'artistes, elle avait la gestion de ce lieu
artistique et culturel depuis plusieurs années dans le cadre d’un marché
public. Ledit marché prenant
fin, l'association a postulé de nouveau et vient d’apprendre qu’elle l’a
perdu au profit d'une association d’artistes bien éloignée de
l'éducation populaire.
Motion de soutien
L’ICEM-Pédagogie
Freinet, partenaire de l’association T.R.A.C.E.S, réuni ce jour en
Assemblée générale, apporte son soutien à l’association T.R.A.C.E.S qui
se reconnait effectivement dans les principes développés par Célestin
Freinet, tant sur le plan éducatif que sur le plan social et culturel.
L’Assemblée
générale de l’ICEM-Pédagogie Freinet s’élève contre la mesure injuste
qui frappe l’association T.R.A.C.E.S et l’empêchera de fonctionner et de
pérenniser un projet ambitieux ayant pour objectif l’accès à la culture
pour l’ensemble de la population d’un quartier dans lequel elle est
ancrée depuis une dizaine d’années.
L’Assemblée
générale de l’ICEM-Pédagogie Freinet s’insurge contre les jugements de
valeur portés à l’encontre des compétences de l’équipe de T.R.A.C.E.S et
de ses partenaires. De telles décisions empêchent la mise en œuvre de
politiques alternatives de progrès social indispensable à toute
démocratie.
L’Assemblée
générale de l’ICEM-Pédagogie Freinet déplore que des considérations
d’ordre économique prennent le pas sur la politique culturelle d’une
collectivité territoriale.
L’ICEM-Pédagogie
Freinet espère que la municipalité saura trouver des solutions à la
hauteur du projet d’éducation populaire porté par l’association
T.R.A.C.E.S.
Paris, le 21 avril 2012,
adoptée à l’unanimité des présents
|
|
|
|